Ukraine, quels chemins vers la paix ?

Domaine public

La paix en Ukraine ne peut pas se faire au détriment de sa souveraineté. Le conflit actuel repose sur l’échec de la paix nucléaire et le délitement des organisations multilatérales.

La paix nécessite une Ukraine souveraine

Le risque de mondialisation du conflit ou d’escalade pour reprendre l’expression consacrée est au cœur des débats politiques de notre pays. Derrière cette question se cache un raisonnement qu’il faut dépasser. 

Une défaite de l’Ukraine permettrait-elle une paix plus rapide ?

Non. L’occupation militaire de l’Ukraine ne serait pas moins coûteuse humainement que la poursuite de la guerre. Les occupations d’Irak, d’Afghanistan ou de Palestine invalident cette hypothèse. 

Rien n’est plus faux que de penser qu’il existe une paix possible dans la défaite de l’Ukraine. Une paix juste et durable ne peut exister que dans la souveraineté des peuples. Aucune nation n’a jamais accepté une paix de domination. 

L’existence de l’Ukraine moderne est d’ailleurs le fruit de ce constat par Lénine. Le révolutionnaire russe a d’ailleurs été fustigé par Vladimir Poutine dans une de ses diatribes ethnonationalistes aussi haineuses que révisionnistes, comme « architecte de l’Ukraine ». En reconnaissant à chaque peuple dominé de l’empire russe une forme de souveraineté, Lénine a permis l’existence de l’Ukraine d’aujourd’hui. 

La période révolutionnaire et de guerre civile qui a suivi est complexe et le pouvoir soviétique a agi parfois avec la brutalité qui caractérise les gouvernements de guerre. Cependant, la poursuite du tsarisme aurait rendu l’indépendance de l’Ukraine aussi folklorique que celle de la Bretagne. 

La paix en Ukraine ne peut exister que dans le cadre d’un État souverain, première condition à une solution démocratique.

Le désarmement nucléaire

Une autre condition de la paix est le désarmement nucléaire. La Russie a pu se permettre ce conflit en sachant que son absurde arsenal nucléaire lui permettait de rester largement à l’abri d’une coalition militaire internationale.

L’arme nucléaire, largement encore présentée comme l’outil qui aurait permis d’éviter un nouveau conflit mondial, est en réalité celui qui a vidé de son sens l’ambition initiale de l’ONU. Aucune opération de maintien de la paix n’est possible contre une puissance nucléaire. 

Ce musellement de l’ONU par la force de l’atome est aujourd’hui responsable d’un conflit parmi les plus sanglants de ces dernières décennies. 

Il paraît impossible aujourd’hui de commencer un désarmement nucléaire. Au contraire, en sortant du dernier traité de contrôle de l’armement, la Russie a officialisé la relance de la course à l’armement nucléaire. 

Cet état de fait n’est pas un horizon indépassable et il faut préparer dès à présent un futur sans armes atomiques.  

Le retour du droit international

L’autre volet d’une paix durable est le réel engagement des grandes puissances à un cadre multilatéral de bonne foi. 

Le refus d’un grand nombre d’États de condamner explicitement l’invasion russe de l’Ukraine est moins le fruit d’efforts diplomatiques de la Russie que d’un contexte international marqué par les violations répétées du droit international. 

L’invasion de l’Irak par les États-Unis a été un marqueur. L’interprétation très libre de la « no-fly zone » décrétée au-dessus de la Libye également. Les violations de l’embargo sur les armes en direction de ce pays continuent d’abreuver les différents protagonistes dans l’indifférence quasi générale.  

La paix mondiale doit être l’affaire de tous les peuples du monde. C’est ce principe qui est inscrit dans le préambule de la charte des Nations Unies. 

La résolution du conflit pour aboutir à une paix durable doit se faire dans le cadre du droit et être garantie par l’ONU. La souveraineté de l’Ukraine ne peut donc pas être une variable d’ajustement d’un traité de paix. Cette souveraineté rend par ailleurs impossible toute restriction de la part de l’Ukraine sur ses alliances futures. Un pays souverain est nécessairement libre de sa diplomatie.

Il faut en conséquence aussi envisager la dissolution de l’OTAN. L’extension actuelle de cette alliance belliciste n’est pas un gage de sécurité pour le monde. La seule qualité de membre de l’ONU doit suffire à être défendu dans le cadre d’un conflit armé.

La fin de l’agression russe, préalable à la paix

Le chemin vers la paix, quelles que soient les options retenues, comporte également un préalable. Le renoncement de la Russie à son offensive militaire et l’acceptation de la souveraineté de l’Ukraine dans ses frontières. Ce prérequis à un règlement plus large du conflit (situation de la Crimée, de l’est de l’Ukraine, des sanctions économiques, etc.) ne dépend que d’un seul acteur : la Russie et donc, pour une large partie, son président. Le règlement du conflit en revanche dépend de tous.

Parlons déjà du prérequis qui dépend de Vladimir Poutine. Cette réalité est inconfortable, car elle est largement hors d’atteinte des actions politiques en France. Pour l’instant, elle est indépassable, ce n’est pas en réduisant le soutien de la France à l’armée ukrainienne que la paix avancera. La défense ukrainienne n’est pas responsable du conflit qui ravage son sol.

La France peut toutefois agir différemment pour faire entendre une voix de paix. Par des actes symboliques, en signant le traité pour l’interdiction des armes nucléaires ou en préparant sa sortie de l’OTAN. Par des actes concrets, en refusant de participer à l’actuelle course à l’armement ou en soutenant un poids plus important de l’Assemblée générale à l’ONU.

Un an après l’offensive russe, la guerre en Ukraine est en passe de devenir le point de départ d’un nouveau conflit global. L’arrêt des combats est de la seule responsabilité russe, mais la paix mondiale est celle de tous les États et la France y a un devoir. 

Par Rédaction

Collectif de rédaction d'Avant Garde