Six nations féminin, le XV français derrière les anglaises

CCO domaine public

Malgré de très bonnes performances sportives lors des rencontres internationales et une pratique en hausse, le rugby féminin peine à se faire une place dans le monde professionnel. 

L’autre tournoi des six nations

Depuis le 2 février dernier et jusqu’au 14 mars prochain a lieu la 25e édition du tournoi des 6 nations de rugby à 15. Nous n’allons pas parler ici du tournoi des 6 nations masculin, mais celui des équipes féminines qui a lieu chaque année depuis 1996. Durant 5 semaines, les 6 équipes nationales européennes s’affrontent sur le terrain du ballon ovale pour obtenir le titre de champion d’Europe : France, Angleterre, Écosse, Pays de Galle, Italie, Irlande.

Instauré en 1996 le Tournoi féminin de rugby à 15 ne voyait s’affronter que 4 équipes, les 4 équipes anglo-saxonnes. C’est en 1999 que la France intègre le tournoi, le tournoi devient alors le tournoi des 5 nations. Entre 2000 et 2001, l’Espagne prend la place de l’Irlande et c’est depuis 2002 que le tournoi est devenu celui des 6 nations avec l’arrivée de l’Italie. L’Espagne est remplacée en 2006 par l’Irlande qui fait son grand retour dans la compétition.

Le tournoi a été remporté 6 fois par les Françaises, mais l’équipe à abattre est l’équipe d’Angleterre, la favorite du tournoi avec 15 victoires à son actif.

La France en route pour une probable seconde place

Pour cette 25e édition, la France est pour l’instant 2e au classement avec ses 11 points, elle talonne l’Angleterre qui compte 13 points. Pour leur premier match de la compétition, les Françaises se sont inclinées face aux Anglaises (13-19), mais depuis les Françaises voient loin, elles sont sorties gagnantes et haut la main des deux matchs qui ont suivis. Face à l’Italie le match se termine par un 45 à 10, et face au Pays de Galle il s’agit d’une victoire écrasante de la France, 50 à 0, avec 8 essais marqués, dont 5 à la deuxième mi-temps.

Pour la 4e journée, la France aurait dû affronter l’Écosse le 7 mars à Glasgow, avant-dernière au classement avec un point, le match a été cependant reporté suite à la contamination d’une joueuse écossaise par le coronavirus. Si la France a l’avantage sur ses prochains matchs, il faudrait que l’Angleterre face de grosses erreurs lors des dernières journées pour que les bleues espèrent remporter le tournoi.

La professionnalisation du rugby féminin

Ce qui donne l’avantage à l’Angleterre lors des matchs ce sont ses joueuses professionnelles. Lorsqu’il s’agit de professionnalisation des athlètes féminines, la France reste à la traîne.

Les hommes qui évoluent en instances nationales, eux, sont passés pro depuis 1995. Pour les femmes, c’est plus long. Depuis novembre 2018, seules 24 joueuses françaises ont obtenu par la FFR (Fédération française de Rugby) un statut de joueuse semi-professionnelle, c’est-à-dire qu’elles sont à mi-temps. Pour le reste des athlètes qui évoluent en ligue nationale, être dans l’équipe de France signifie travailler à côté ou bien être en étude.

Le contrat fédéral à mi-temps est un début, il a déjà porté ses fruits, les résultats de l’équipe de France depuis près de deux ans le montrent, cependant le chemin est encore long à parcourir pour la reconnaissance de la pratique féminine et sa professionnalisation.

Une pratique féminine en expansion

Aujourd’hui, on dénombre 21 000 licenciées, bien qu’il s’agisse d’une augmentation de 86 % depuis 2014, elles ne représentent pour l’instant que 3 % des pratiquant·e·s de Rugby alors que c’est 50 % pour les autres pays. Le rugby est le sport d’équipe qui se développe le plus au monde, et au sein de la FFR, le nombre de licenciées augmente, à l’inverse de chez les hommes.

La Fédération française de Rugby a tout de même la volonté de structurer petit à petit la féminisation du rugby. Pour Serge Simon, le vice-président de la FFR, « Ce qui pourra faire grandir le rugby dans la pratique et son économie, c’est la pratique féminine ». Cette volonté de la Fédération de développer la pratique féminine du rugby se traduit par la création d’académies mixtes pour les filières fédérales et les clubs professionnels. Mais en septembre on dénombrait dans ces académies 340 hommes pour seulement 88 femmes.

« Ce qui pourra faire grandir le rugby dans la pratique et son économie, c’est la pratique féminine »

L’exposition nécessaire du rugby féminin

La visibilisation du tournoi et la diffusion du match participent également à la féminisation de la pratique. Cela a déjà été le cas avec la coupe du monde de rugby, cela se vérifie également dans le football où l’on a vu une augmentation des adhésions des jeunes filles dans des clubs depuis septembre.

Cette année et pour la deuxième année consécutive, le tournoi est diffusé sur les chaînes de la TNT. La nouveauté pour 2020 est que deux matchs sont diffusés en direct sur France 2, le reste sur France 4, permettant de visibiliser et de populariser d’autant plus le tournoi.

Cependant, le tournoi des 6 nations des féminines à lieu en même temps que celui des équipes masculines. La FFR a la volonté de modifier le calendrier afin que les femmes ne disputent plus la compétition en même temps que les hommes dans l’objectif d’augmenter le nombre de supporters et d’attirer davantage l’attention des médias. Lors du coup d’envoi, le stade était plein et cela a représenté 13 % des parts d’audience, alors qu’elles s’élèvent à 39 % chez les hommes.

La coupe du monde comme accélérateur ?

L’équipe de France féminine de Rugby est une référence mondiale avec un meilleur palmarès que celui de leurs homologues masculins. Elle est très bien classée au classement général et se positionne déjà dans l’objectif 2021, celui de la coupe du monde, et espère décrocher une place en finale.

Bien qu’il n’existe pas de ligues professionnelles pour les femmes, elles ont une technicité et un entraînement physique clairement professionnel, avec un spectacle de qualité pour chaque match. À la différence des hommes qui vont vivre à 100 % de leur sport, les femmes vont devoir travailler à côté, prendre des congés ou négocier avec leurs employeurs pour préparer les tournois et améliorer leur performance.

Le rugby amorce certes sa professionnalisation avec l’instauration des contrats fédéraux pour les internationales du XV de France, mais le chemin est encore long à parcourir pour obtenir la reconnaissance dont bénéficient les hommes, reconnaissance que les footballeuses effleurent à peine du bout du pied aujourd’hui.