Réforme du Bac : vers plus d’inégalité

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Un premier rapport sur des pistes de réforme du Bac doit être remis au ministre de l’éducation aujourd’hui. Les principales pistes envisagées sont déjà connues.

Retour vers le passé

Dans sa version générale le Bac a peu changé depuis 1995, et la mise en place des série ES, L et S.  Xavier Darcos, ministre de l’éducation sous Sarkozy avait dû renoncer à le réformer face à la mobilisation des lycéens.  Le diplôme sanctionnant la fin des études secondaires est régulièrement accusé de tous les maux.

Trop simple à obtenir, comportant trop d’épreuves, trop cher, ou encore trop stressant, peu de choses n’ont pas été reprochée à ce diplôme. Véritable marqueur d’entrée dans l’âge adulte pour une part importante des jeunes, et jusqu’à il y a peu sésame vers l’enseignement supérieur, le Bac symbole du vieux monde, est la cible du nouveau.

Pourtant les pistes de réformes dont la presse se fait l’écho respirent davantage le XIXe siècle que le XXIe.

Une organisation en semestres

Actuellement organisée en année scolaire, découpée en trimestres, l’organisation de l’année se ferait désormais en semestres sur le modèle de ce qui se fait à l’université. Cette nouvelle division permettrait de couper le lycée en six semestres plutôt qu’en trois années avec des programmes et emplois du temps différents.

Cette nouvelle organisation du temps doit permettre notamment de diviser en deux temps les épreuves terminales du bac. Ou encore de choisir des options dès le deuxième semestre de seconde.

Cette organisation permettrait de changer d’option en cours d’année et d’entamer la spécialisation plus tôt dans le parcours du lycéen. La semestrialisation ira de pair avec la suppression des filières et des parcours modulaires.

Suppression des filières pour des choix modulaires

Les lycéens devront choisir deux matières majeures et deux mineures. Les autres matières étant un tronc commun obligatoire. Les possibilités de combinaisons de matières majeures seront fixées mais seront assez nombreuses. Trop nombreuses pour être proposées toutes dans chaque établissement.

Alors qu’aujourd’hui même si toutes les options ne le sont pas, la totalité des trois filières générales est proposée dans chaque lycée. Pire des “majeures d’établissements” pourraient exister mettant de facto fin à l’égalité sur le papier entre les lycées. C’est donc un enseignement secondaire à plusieurs vitesses qui se dessine.  

La composition du tronc commun n’est pas encore arrêtée, même si on peut déjà affirmer que l’EPS, le français, les maths, les langues vivantes, ou encore la philo en terminale devraient en être.

Des modules dédiés à l’orientation ou encore à combattre les théories du complot sont également envisagés. Au-delà même de l’intérêt discutable de tels modules, il est presque certains que les moyens ne suivront pas les ambitions. De même un temps spécifique de méthodologie dédié notamment à la préparation de l’oral est envisagé.

Un examen limité et divisé

Le Bac serait limité à six épreuves. Le reste des matières auront lieu en controle continu ou examen non national à la fin de chaque semestre. L’anonymat des copies n’y résistera probablement pas, on observe déjà de nombreuses entorses à ce principe dans les notes de TD à la fac.

L’épreuve de français aura toujours lieu à la fin de l’année de première comme actuellement accompagnée d’une autre matière. En terminale deux épreuves seraient passées à la fin du premier semestre et le deux autres à la fin de l’année. L’examen final serait composé de deux épreuves, un “grand oral” et une écrit en philosophie.

Ces deux épreuves terminales sentent bon le XIXe siècle. L’examen oral est l’épreuve la moins égalitaire et plus sujette à caution. L’expression orale s’avère généralement bien plus révélatrice de l’environnement d’un jeune que son expression écrite, le corps enseignant est loin d’être à l’abris des préjugés qui traversent la société. La volonté gouvernementale de voire des personnes extérieures examinatrices de cet organe pose également question.

Enfin les épreuves de rattrapages disparaîtraient au profit d’une très discutable étude du dossier scolaire.

Le choix de l’inégalité

Ces pistes envisagées si elles devaient se matérialiser représenteraient un recul considérable de l’égalité de traitement entre les lycéens. Non seulement certaines combinaisons de matières principales pourraient ne pas être disponibles partout, mais en plus les établissements les plus aisés auraient toute latitude pour se distinguer en produisant leurs propres matières principales.

Les lycées dans les territoires les plus pauvres ont bien souvent des équipes enseignantes plus jeunes qui ne cherchent pas nécessairement à s’investir dans un projet d’établissement. La distance de l’établissement est pourtant un facteur déterminant dans son choix par l’élève, surtout que ces derniers vivent chez leurs parents. Ce serait une aggravation des inégalités territoriales.

La modularité mise en avant risque d’être limitée dans les faits par les contraintes d’occupation des salles et d’emploi du temps des établissements. Il est probable que dans les faits au sein d’un même établissement, les possibilités de combinaison soient restreintes reproduisant in fine les filières actuelles.

Par Rédaction

Collectif de rédaction d'Avant Garde