Pedro Sanchez a remporté la motion. Et maintenant ? (déclaration de l’UJCE)

CC 2.0 BY SA | Luis Javier Modino Martínez

Nous avons traduit la déclaration du comité centrale de l’UJCE, les jeunes communistes espagnoles suite à la motion de censure contre Rajoy qui a vu revenir au pouvoir le PSOE dirigé par Sanchez.

Depuis plusieurs années, nous développons l’analyse que nous sommes en train de vivre une crise de Régime qui montre plusieurs facettes, parmi lesquelles une crise de légitimité du bipartisme qui a gouverné au cours des 40 dernières années. Ceci ne suppose nullement (actuellement) une remise en cause du système économique, origine des problèmes dont souffre le peuple travailleur en Espagne. Cependant, elle peut favoriser la conquête de droits qui renforcent la situation des travailleurs-euses, inversant la dynamique précédente.

Pour la Jeunesse communiste, c’est une bonne nouvelle que le Parti populaire abandonne le gouvernement, non seulement du fait du haut niveau de corruption qu’il a exercé dans les différentes institutions, mais plus particulièrement parce qu’il a été le principal responsable de la situation d’extrême précarité que vit notre peuple. Ces deux aspects ont été accompagnés d’une augmentation de la répression, point le plus visible de la détérioration des droits civils fondamentaux.

Malgré cela, nous ne pouvons placer de faux espoirs dans le PSOE ou dans Pedro Sánchez. Sous le slogan « nous sommes la gauche », ils ont tenté de se positionner comme étant l’option de gauche du Régime. C’est un fait que, en dépit des innombrables « trahisons » dont s’est rendu coupable cette formation, de nombreux travailleurs continuent à la défendre et à la voir comme leur parti. Les médias ont contribué à forger cette image, mais nous, forces de rupture, devons mener un exercice d’autocritique pour avoir « blanchi » le rôle du PSOE en de nombreuses occasions.

Nous affirmons que nous ne plaçons aucune confiance dans le PSOE ou en Pedro Sánchez, car nous nous fions aux actes et non aux paroles. En ce sens, les gouvernements du PSOE ont été responsables du maintien de l’Espagne dans l’OTAN, de la perte de souveraineté et de la dramatique désindustrialisation – fruit de l’entrée dans la Communauté économique européenne -, pour ne pas parler de leurs liens avec le terrorisme d’État à travers des GAL [Groupes antiterroristes de libération]. Ces questions peuvent sembler lointaines aux jeunes d’aujourd’hui, mais d’autres mesures du PSOE, telles que l’implémentation des ETT [agences privées de recherche d’emploi], la réforme du droit du travail qui a ouvert la voie à celle du P, ou la priorité donnée au paiement de la dette au détriment des dépenses sociales, sont en bonne partie la cause de la situation de précarité extrême du travail que vit la jeunesse. Nous pouvons dire la même chose au sujet de l’implémentation par le PSOE de toutes les mesures venues de l’Europe qui marchandisent et rendent élitiste l’éducation, comme le processus de Bologne.

Il est essentiel de signaler que le nouveau gouvernement accède au pouvoir politique sans programme à évaluer. Il a non seulement indiqué qu’il maintiendrait les budgets généraux du PP, mais a aussi appelé, lors du débat sur la motion de censure, à la « responsabilité » de la gauche. Nous ne devrions pas placer trop d’espoirs quant au fait que le nouveau gouvernement conduise à des avancées significatives pour la situation de la classe ouvrière. Malgré cela, il est évident que le panorama politique a changé. La crise institutionnelle (avec un PSOE qui aura d’importants problèmes de gouvernabilité) laisse ouverte la crise de Régime. De plus, le nouveau parti au gouvernement ne dispose plus d’excuses pour ne pas mener à bien, le plus rapidement possible, toutes les initiatives parlementaires qui avaient été bloquées par le PP et Ciudadanos et qui reviendraient sur les principales mesures antipopulaires de ces dernières années (depuis la réforme du droit du travail jusqu’à la « loi bâillon » [Ndlr : Ley mordaza : loi sur la “sécurité publique” adoptée en 2015 et qui interdit notamment de photographier les policiers en service, de manifester devant les parlements nationaux et régionaux, etc. ]  ou la LOMCE [Ndlr : Loi organique pour l’amélioration de la qualité éducative]). Pour ce faire, nous aurons non seulement besoin de la pression au Parlement du groupe confédéral Unidos Podemos, mais aussi de la pression dans la rue.

Le mouvement féministe et les retraité-es nous ont démontré qu’il est possible d’obtenir des victoires lorsqu’il existe une revendication juste et des mobilisations unitaires. En tant que Jeunesse communiste, nous considérons que poursuivre dans cette voie reste la seule méthode utile pour transformer notre réalité. C’est pourquoi nous lançons un appel à poursuivre les mobilisations prévues, pour arriver à un automne où nous démontrerons la force imparable du peuple. Il est essentiel que la jeunesse, celle qui travaille, celle qui actuellement est au chômage, les étudiant-es d’origine populaire, se joigne à ces mobilisations, comme l’ont déjà fait des centaines de milliers de jeunes femmes qui ont renforcé le mouvement féministe.

Le capital tente de clore une seconde Transition, qui lui permette de continuer à accumuler des bénéfices sans que soient remises en cause les structures de domination. Avec un PP désormais englué dans la corruption, la force préférée de l’oligarchie économique est Ciudadanos. Mais ceci ne signifie pas que le PSOE ait cessé d’être un instrument utile pour les élites qui dirigent véritablement le destin du pays. Preuve de ceci est le fait que Pedro Sánchez gouvernera avec les budgets votés par PP-Ciudadanos, qui maintiennent les coupes et ne résolvent aucun des problèmes dont souffre aujourd’hui le peuple travailleur. Il n’hésitera pas non plus à appliquer les diktats que lui imposera l’Union européenne. Sans oublier que c’est ce même PSOE qui a soutenu sans ménagements la répression accrue contre le peuple catalan à travers l’application de l’article 155 de la Constitution et le traitement d’un problème politique par les juges et les matraques. L’Espagne plurinationale qui respecte et favorise la diversité des nations et des peuples qui la composent ne pourra advenir que dans la République que nous devrons construire quand nous ferons tomber ce Régime périmé.

C’est pour toutes ces raisons que la Jeunesse communiste appelle la jeunesse à poursuivre la mobilisation dans les rues et à construire l’Unité populaire, qui nous permette non seulement de nous débarrasser du PP mais aussi du Régime (dont les principaux acteurs sont aujourd’hui le PP, Ciudadanos et le PSOE) qui gouverne pour les grands patrons et banquiers, à l’encontre de la grande majorité du peuple.

Nous, jeunes, vivons une situation dramatique : presque 50 % de chômage (le deuxième plus haut taux dans l’UE), une précarité absolue pour celles et ceux qui ont un emploi, des centaines de milliers de jeunes forcé-es à émigrer, impossibilité d’accéder à un loyer raisonnable, expulsion de milliers d’étudiant-es de l’université, et en fin de compte l’impossibilité de mener à bien un projet de vie. Les faux espoirs du PSOE ne résoudront aucun de ces problèmes. Seule une jeunesse mobilisée et organisée, aux côtés du mouvement féministe, des retraité-es, et particulièrement du mouvement ouvrier (qui a beaucoup à dire en ce moment) pourront garantir nos droits et la conquête d’une vie digne.

Adieu au PP. Séparons-nous aussi du Régime de 1978.

La jeunesse à la conquête d’une vie digne !

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Par Rédaction

Collectif de rédaction d'Avant Garde