“Ici on crève” : grève de la faim des soignant·e·s à l’hôpital du Rouvray

Clémentine Le Duey | Avant Garde

Le 22 mai, à l’hôpital du Rouvray à Sotteville-les-Rouen, quatres hospitaliers se sont mis en grève de la faim. Depuis cette date quatres autres les ont rejoints.

Lundi avec 14 jours de grève deux d’entre eux – qui témoignent dans la vidéo Konbini – ont été emmenés par le samu dans un état critique lundi, mardi deux autres ont dû arrêter. Ils ont perdu jusqu’à 14% de leurs poids, ils risquent des séquelles irréversibles.

“Depuis 2012 ont met des pansements sur une jambe de bois” Jean Yves, gréviste.

Si ces agent·e·s se mettent en danger de mort c’est pour éviter celles de leurs patients et parce que la grève “classique” entamée le 22 mars ne leur a pas permis de se faire entendre.

Leur établissement est en sur-occupation, certains lits de patient·e·s sont placés dans des bureaux avec un seau pour faire ses besoins, des adolescent·e·s de 10 ans sont mélangés aux patient·e·s adultes ou faute de solution mis à l’isolement. Les locaux vétustes ne sont pas aux normes et ne permettent pas d’accueillir l’augmentation du nombre de patient·e·s.

Les employé·e·s sont en sous effectifs, épuisé·e·s eux mêmes ils mettent de leur propre aveu les patients en danger. Conséquence d’un sous investissement dans les centres psychiatriques d’années en années tandis qu’ils reçoivent de plus en plus de patient·e·s.

52 postes ou rien

Les syndicats estiment le besoin de moyens humains à 179 postes. Conscients que la bataille serait très difficile ils n’en demandent que 52 de soignant·e·s et d’infirmier·e·s, renonçant aux postes “logistiques” : assistant·e·s sociales, secrétaires, etc. Les enquêtes faites par le CHSCT rejoignent les demandes des soignant·e·s en estimant le manque à 56 personnes. Pour toutes réponses on leur propose des audits, pour compléter les deux déjà réalisés ces dernières années pour un coût de 330 000 euros.

C’est aussi la réponse d’Agnès Buzyn qui face à l’urgence de l’état de santé des grévistes a renoncé à un audit de trois semaines en faveur de “quelques jours seulement”. Le déni de réalité s’accompagne d’un déni de la capacité des salarié·e·s à connaître les besoins de leur propre lieu de travail. La direction de l’établissement a quant à elle quitté les lieux depuis une semaine, qui sont désormais occupés par les grévistes.

There is no alternative.

Mme Buzyn, interrogée à l’assemblé par Hubert Wulfranc (député PCF de la circonscription du Rouvray), ne répond que par la langue de bois. Même non propositions du côté des député·e·s En marche de Seine-Maritime qui demandent aux grévistes de reprendre le dialogue – comment avec une direction qui a déserté ?

Après la visite de Benoît Hamon (génération.s), Philippe Poutou (NPA), Céline Brulin (Sénatrice PCF) et Hubert Wulfranc (Député PCF), ainsi qu’une manifestation réunissant 1000 personnes dans Rouen ce lundi donnant au mouvement une médiatisation de plus en plus grande. L’ARS a enfin réagi en organisant une réunion avec l’intersyndicale mardi soir. Celle ci propose : la création d’une unité pour les détenu·e·s et une unité adolescent·e·s accompagnées d’une diminution de l’activité sans toutefois répondre au sujet des 52 postes.

Les grévistes doivent en décider ce mercredi après-midi. Les dockers de la CGT Rouen appellent eux à la grève en solidarité aux soignant·e·s ce jeudi.

Mise à jour du jeudi 7 juin

Mercredi les soignant·e·s ont refusé·e·s le plan de sortie de crise proposé par l’ARS. Celui ci ne promettait pas les 52 postes demandés, il correspondait encore une fois à un petit pansement sur une hémorragie. Les grévistes attendaient la venue ce jeudi des expert·e·s promis par Mme Buzyn suite à la question au gouvernement de Hubert Wulfranc, ils ne viendront pas. “L’audit flash” a été annulé, l’ordre viendrait du conseil des ministres. En réaction les soignant·e·s soutenu·e·s par des cheminot·e·s, des dockers et des étudiant·e·s ont bloqué·e·s des voies d’accès à Rouen et manifestent ce vendredi devant l’ARS.

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Clémentine Le Duey | Avant Garde