Merci et au revoir Mashrou’ Leila

Domaine public

Après plus de 10 ans de mélodies entêtantes, le groupe Mashrou’ Leila a annoncé sa dissolution. Ce sont les différentes annulations, les pressions, les menaces de mort qui auront eu en partie raison du groupe devenu symbole de liberté. 

Mêlant rock alternatif et electro sur fond de musique arabe traditionnelle, le groupe avait imposé sa touche. Du rock qui fait planer avec toujours la voix envoûtante de Hamed Sinno, un cri du cœur. 

Le groupe doit aussi sa notoriété à ses textes, qu’ils écrivent eux-mêmes. Liberté, amour, corruption politique, volonté démocratique : les mots d’une jeunesse. Leur musique dépasse vite les frontières du Liban pour devenir des hymnes du printemps arabe, mais pas uniquement, le groupe se produira partout dans le monde. 

Révélant s’il le fallait encore que le Moyen-Orient a toute sa place sur la scène indie rock et que la musicalité de la langue arabe n’y est pas pour rien. 

Des clips inoubliables

En plus d’une identité musicale forte, Mashrou’ Leila crée aussi une identité visuelle. Les clips du groupe sont travaillés, toujours insolents, poétiques et d’une qualité rare. Le premier « fasateen » se moque des conventions traditionnelles du mariage, c’est sûrement l’un des plus subversifs. 

Impossible de ne pas citer « Cavalry » un hommage à Ahed Tamimi, activiste palestinienne, si réaliste qu’il dérange. Parmi tous les clips, « Roman » se dégage largement pour son esthétisme, le désert, des femmes qui dansent et un message féministe qu’on devine sans même comprendre les paroles tant l’image est forte. 

Le prix de l’engagement

Mashrou’ Leila, en plus d’une musique de qualité, c’est aussi un engagement fort. Féminisme, lutte sociale, volonté de changer de régime, liberté, anti-impérialisme sont des thèmes récurrents. Surtout, le groupe va se faire connaître pour son engagement contre les LGBTIphobies. Hamed Sinno, la voix du groupe, est gay, il ne s’en cache pas, et c’est déjà trop pour beaucoup d’ultras conservateurs. 

Dans les concerts de Mashrou’ Leila sont brandis des drapeaux arc-en-ciel, ce qui leur vaudra plusieurs interdictions pour atteintes aux bonnes mœurs. C’est notamment le cas en Égypte : lors d’un des concerts du groupe, la militante communiste Sarah Hegazi se fait remarquer par le pouvoir, elle sera torturée en prison pendant plusieurs mois. Après avoir trouvé asile au Canada, elle ne trouvera jamais la paix. 

Même au Liban, leur pays d’origine, le groupe sera interdit de concert pour blasphème suite à des pressions d’ultra catholiques. À ses interdictions officielles s’ajoute un harcèlement quotidien, jusqu’à des menaces terroristes subies par l’ensemble des membres. 

Lassé d’un poids lourd sur leurs épaules et alors que s’y est ajouté celui d’un Liban dans une crise immense, le groupe n’avait plus sorti d’album depuis 2019. 

Pourtant, en ce mois de septembre, face à l’annonce de la dissolution du groupe, l’émotion des fans est vive. C’est un groupe qui a accompagné les aspirations d’une génération partout dans le monde. 

Mashrou Leila en 3 chansons

« Promise Land » en duo avec Mika 

« Marrikh » 

« Lil Watan »