« La ténacité est notre moyen de résister à l’occupation »

Domaine public

Sami Huraini a 23 ans, étudiant en droit, il est défenseur des droits humains en Palestine. Originaire d’At-Tuwani, village des collines au sud d’Hébron en Cisjordanie, il est le cofondateur du mouvement « Youth of Sumud ». Il a été arrêté à plusieurs reprises par l’armée israélienne. 

Que représente Sumud pour les Palestiniens ?

Tout dans notre vie devrait nous pousser à partir de nos terres. En tout cas, c’est l’objectif de l’État israélien que nous les Palestiniens quittions nos terres. 

C’est pour cela que des checkpoints sont mis en place, que nous sommes arrêtés sans raison, qu’un mur nous sépare de nos familles, que nos ressources sont volées. Je mets 90 minutes pour aller à l’université d’Hébron. Les colons de Ma’aon, colonie à côté de mon village, ne mettent que 30 minutes pour s’y rendre. 

Ma grand-mère a souvent été attaquée par des colons, elle a même été battue pendant qu’elle gardait ses moutons. Pourtant elle reste, malgré la violence, parce que ce sont nos terres. 

Le sumud, c’est la ténacité en arabe. Sans sumud, il n’y a pas de résistance. Sans résistance, il n’y a plus d’espoir. Rester alors que tout nous pousse à partir, c’est la façon que nous avons de résister de manière pacifique pour la paix et la justice.

Quels sont les objectifs et les actions de « Youth of Sumud » ? 

Youth of Sumud regroupe une trentaine de jeunes des villages aux alentours d’Hébron. Nous avons lancé le mouvement en 2017 avec d’autres enfants de la famille, des amis. La meilleure stratégie face à l’occupation, c’est de mettre en place une résistance populaire pacifique. C’est ce que nous essayons de faire avec notre association. 

Nous nous opposons à l’extension des colonies israéliennes autour de nos villages et nous essayons d’organiser la protection des habitants contre les attaques régulières des colons. Nous menons des actions locales pour inciter les villageois à rester. C’est en restant que l’on va pouvoir contenir l’influence de l’occupation israélienne. Par exemple, on organise des plantations d’olivier dans la forêt à côté de la colonie. On accompagne les élèves à l’école du village voisin pour leur sécurité. On organise aussi des ateliers sur la pratique de la non-violence avec les jeunes.

Un mot sur les démolitions et les expulsions à Masser Yatta ? 

La « justice » israélienne a donné son accord pour la démolition de 8 villages et pour expulser les habitants qui y vivent. 1300 personnes y vivent et élèvent leurs bêtes. Des démolitions de maisons ont lieu chaque jour, et des familles se retrouvent sans lieu où vivre. Leurs terres sont remises à l’armée israélienne. 

Certaines se réfugient dans des grottes de la région. On n’avait pas connu une expulsion aussi massive depuis 1967. C’est un transfert forcé, c’est une injustice. 

Quel message souhaiterais-tu adresser aux jeunes de France sur l’occupation de la Palestine par Israël ainsi sur la colonisation ? 

On a besoin de la solidarité, que des jeunes s’engagent dans leurs pays pour que leurs gouvernements agissent pour les Palestiniens, pour notre liberté. C’est avec la jeunesse en Palestine, mais aussi en France et ailleurs que nous allons pouvoir retrouver notre liberté. 


Les colonies 

Une colonie est un espace ou une zone de peuplement dans les territoires occupés. Les colons vivent enfermés (souvent derrière de grands grillages) et gardés par l’armée. Illégales au regard du droit international, les colonies sont souvent reliées entre elles par des routes interdites aux Palestiniens. Plus de 600 000 colons israéliens sont installés sur ces territoires où vivent près de trois millions de Palestiniens. Israël vise un million de colons d’ici 2030. 

Le mur 

En construction depuis 2002 par Israël et long de 730 km, le mur empiète sur les frontières de 1967, parfois de près de 23 kilomètres. Véritable mur de l’apartheid, il coupe des villages en deux, prive les Palestiniens de leurs terres les plus arables, de l’accès à l’eau, les contraint dans leurs déplacements.

Les arrestations 

On estime que, depuis 1967, pas moins de 800 000 Palestiniens ont déjà connu la privation de liberté au moins un jour. Les arrestations arbitraires et souvent brutales font partie d’une stratégie qui vise à briser la détermination des Palestiniens et des Palestiniennes en les plaçant systématiquement en prison.