Edito : Parcoursup, pour continuer l’austérité

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APB est aujourd’hui enterré. La loi qui doit le consacrer n’est même pas encore totalement votée et doit passer devant le Sénat en février. Pourtant ce matin, la plateforme de remplacement a été mise en ligne.

La communication gouvernementale de cet été aura permis de déplacer le débat sur un terrain qui lui est nettement plus favorable. Tout en annonçant de nouvelles mesures d’austérité dont l’emblématique baisse des APL, le gouvernement a réussi à faire croire qu’il allait s’attaquer aux difficultés rencontrées par les étudiants dans leur poursuite d’étude.

Mettant en exergue les honteux tirages aux sort effectués à l’entrée de certaines filières, le gouvernement en a rejeté la faute sur l’infrastructure informatique chargée de l’affectation des bacheliers. Pourtant ce n’est pas APB qui a réduit les budgets par étudiants attribués aux universités. Ce n’est pas non plus lui qui a sciemment organisé la pénurie de places.

De plus, il faut souligner que, aussi absurde et injuste que soit la sélection par tirage au sort qui s’opérait, il s’agissait d’un phénomène très minoritaire.

Le gouvernement a pourtant fait le choix de compliquer encore un peu plus le quotidien des étudiants en baissant les APL, puis en augmentant les frais d’inscriptions en y ajoutant une participation forfaitaire de 90€ dite “vie étudiante”.

Alors qu’on aurait très bien pu imaginer une modification d’APB pour correspondre aux nouveaux critères, le gouvernement a fait le choix de la table rase et d’une nouvelle plateforme. Derrière elle plusieurs importants changements sont ainsi en passe de transformer la logique de l’enseignement supérieur public.

Désormais le bac n’est plus une clef d’accès à l’enseignement supérieur. Il est toujours nécessaire bien entendu de l’avoir, mais ne garantira plus un accès à l’enseignement supérieur public. Sous l’apparence de s’attaquer à des dysfonctionnements d’ordre logiciel, le gouvernement a réussi à faire passer l’idée que l’enseignement public ne s’adressait plus à tous.

Il ne s’agit pas comme la République en Marche se plait à le raconter de combattre l’échec. On ne combat pas l’échec en restreignant l’accès. Est-ce qu’un match non joué est un match non perdu ?

La possibilité ouverte désormais pour l’ensemble des établissements publics d’enseignement supérieur de choisir leurs élèves va vers une restriction des possibilités de poursuite d’études pour un nombre croissant d’élèves. Le dynamisme démographique et un accès plus grand à l’obtention du bac conduit à près de 30 000 nouveaux étudiants supplémentaires chaque année. Dans un contexte où le budget de l’enseignement supérieur ne suit pas, c’est un choix de pénurie qui est fait.

Certes, la sélection des élèves ne se fera plus par tirage au sort. Sera-t-elle pour autant plus juste ? On sait les biais causés par les études de dossiers. On sait que notre société n’est pas égalitaire, et qu’elle est matricée par de nombreuses discriminations.

L’accès sur dossier ne peut que contribuer à une reproduction sociale plus importante encore qu’aujourd’hui. L’orientation genrée ne peut-elle aussi n’être que renforcée. De même pour les discriminations territoriales et xénophobes.

Le nouveau dispositif ne permettra plus de classer les voeux et met en place un système de liste d’attente. Non seulement il sera impossible de déterminer quels sont les élèves ayant obtenu leur premiers choix et donc de mesurer la réponse du systèmes aux réelles attentes des élèves, mais en plus le système de liste d’attente conduira les dossiers les moins valorisés à une réponse plus tardive.

Cette réforme de l’accès à l’enseignement supérieur s’est faite sur un analyse biaisée consistant à dire qu’il était injuste qu’un algorithme procède à des tirages au sort. La vrai injustice c’est qu’un pays comme la France, qui devrait largement avoir les moyens de permettre à chacun de poursuivre des études, organisent la pénurie de places et brise les aspirations des jeunes.

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