31 mars : un an de batailles politiques pour les jeunes !

1,2 million de personnes battent le pavé, répartis dans 250 villes de France, nous sommes le jeudi 31 mars 2016. Ce sont autant de salariés, d’étudiants, de lycéens, de précaires, qui se réunissent à l’appel des syndicats et des organisations de jeunesse pour dire non à la loi El Khomri, dite « loi travail ».  De nombreux lycées sont bloqués, des milliers de salariés sont en grève, la pression monte, c’est la plus grosse journée de mobilisation de ce mouvement social. Elle réunit deux fois plus de participants que celle du 9 mars à l’initiative des organisations de jeunesse.

Gwenn Herbin | Avant Garde

 

Une détermination sans faille

Dans les nombreux cortèges du pays, la colère et la révolte sont au plus haut face au projet de loi du gouvernement. Même sous une pluie battante, à Paris, ce sont cent soixante mille personnes qui défilent de la Place d’Italie jusqu’à Nation. Parmi les 260 cortèges du pays, on dénombre notamment 120 000 personnes à Marseille, 100 000 à Toulouse, 30 000 à Bordeaux etc. La mobilisation est à l’image des 70% de français qui refusent cette loi.  Au départ de la manifestation parisienne Philippe Martinez, secrétaire générale de la CGT, déclare “Aujourd’hui, il y a une très forte mobilisation. C’est d’ores et déjà une réussite, il faut que le gouvernement l’entende et retire son projet”. La détermination est est sans faille et deux nouvelles dates de mobilisation sont déjà prévues les 5 et 9 avril.

“Aujourd’hui, il y a une très forte mobilisation. C’est d’ores et déjà une réussite, il faut que le gouvernement l’entende et retire son projet”

Philippe Martinez, Secrétaire Général de la CGT

Les jeunes à l’offensive

Un SMS tourne dans les manifs : “Très haut niveau de mobilisation chez les jeunes. 250 lycées mobilisés et 10 universités bloquées”. Les obstacles à la mobilisation sont pourtant nombreux. C’est en particulier le cas dans un grand nombre de lycées, où les administrations ont préféré fermer les établissements (une vingtaine à Paris) pour tenter d’empêcher les blocages notamment. De plus l’écho des violences policières résonne et on aurait pu croire que cela démobiliserait. Il n’en est rien, les lycéens sont massivement dans la rue et fournissent le gros des effectifs au sein des cortèges de jeunes à travers toute la France.

“Dans les lycées, le mouvement est très fort malgré la fermeture de certains établissement de la région parisienne”

Samia Mokhtar, Présidente de l’UNL.

Depuis le 9 mars les jeunes sont à l’offensive, et en ce 31 mars, quand l’intersyndicale les rejoint, cela fait trembler le gouvernement. Ils ont raison de s’inquiéter car ces jeunes sont plus rassemblés que jamais. Et non seulement ils s’opposent, mais en plus ils proposent.

L’espoir et l’unité au cœur du mouvement

La veille François Hollande a été contraint de renoncer à la constitutionnalisation de l’état d’urgence et de la déchéance de nationalité. C’est une victoire pour l’ensemble des forces de progrès et des citoyens qui se sont battus contre ce projet nauséabond. Une grande majorité d’entre eux est présente dans la rue le 31 et voit dans ce premier recul du gouvernement une brèche pour en finir avec la politique menée depuis 2012, en premier lieu avec la loi travail.

Gwenn Herbin | Avant Garde

 

Dans ce moment, une grande majorité des forces syndicales, politiques, associatives et citoyennes marchent côte à côte quelques soient leurs divergences par ailleurs. On y voit des syndicalistes, des communistes, des socialistes trahis, des écologistes, des féministes…  Les raisons de la mobilisation sont partagées et l’objectif est commun: marquer un coup d’arrêt à la trajectoire politique du quinquennat.

“François Hollande se moque du monde. Plus personne n’ignore que sa politique a totalement échoué. Ce qui doit être construit par les forces sociales, populaires et politiques aujourd’hui dans la rue, c’est une alternative de gauche”

Pierre Laurent, Secrétaire National du PCF.

La tactique du gouvernement

Certes François Hollande vient de reculer s’agissant de la Constitution. Mais pour la loi travail le gouvernement veut jouer la montre en faisant voter le Parlement pendant l’été… Des petits calculs qui font insulte à la réalité des vies de tous ces jeunes et de ces salariés qui manifestent pour sortir de la galère, pour être respectés et protégés par un code du travail digne de ce nom.

C’est une source d’inquiétude dans les rangs mais unanimement les manifestants s’accordent à dire qu’il ne faut pas laisser passer les vacances scolaires, qu’il faut accélérer la mobilisation et faire plier le gouvernement au plus vite. Le retrait du projet ne semble pas si loin, à ce moment où l’article 49-3 n’a pas encore été dégainé par Manuel Valls…

Debout, de jours comme de nuit

C’était annoncé, au soir du 31, “on ne rentre pas chez nous”. Ainsi après la manifestation, des centaines de personnes affluent sur la Place de la République à Paris. L’objectif est d’occuper l’espace public, d’y faire des assemblées, d’échanger, de réfléchir et de décider… Réinventer la démocratie en somme. Il y a probablement autant de raisons de s’y rendre que de personnes présentes à ce moment là. Cela à l’air spontané et sans cadre lorsque c’est ce qu’on est venu y trouver, mais comme le rappellera plus tard François Ruffin, l’un des instigateur du collectif “Nuit debout”, “ce n’est pas un mouvement spontané, il a fallu l’organiser”. C’est donc notamment à l’appel de ce dernier que cette initiative se prépare. Sur la place on parle, on écoute, on s’observe et on se détend aussi. Puis on se prépare à regarder le film de Ruffin “Merci Patron!”, avant de veiller jusqu’au petit matin, et ainsi de suite pendant des jours.

Et après ?

Nous connaissons la suite: le mouvement a continué mais le gouvernement s’est acharné. Il s’est appliqué par tous les moyens à faire passer en force cette loi, pourtant infiniment minoritaire, au mépris de la mobilisation populaire et de la représentation nationale. Valls aura été jusqu’au bout, comme en témoigne son soutien récent à Macron. Certains se plaisent à dire que ceux qui se sont battus ont échoué sur toute la ligne et qu’il ne reste plus rien. Peut-on honnêtement se dire que les centaines de milliers de jeunes mobilisés il y a un an ne retiennent rien et ont baissé la garde?

Camille Lainé, au micro de Public Sénat Gwenn Herbin | Avant Garde

La réponse est non. Bien sûr la mobilisation n’a pas été victorieuse. Mais dès le départ celle-ci s’étendait au delà de la seule opposition à la loi travail. C’est la politique du gouvernement dans son ensemble qui était rejetée à ce moment là et qui l’est toujours aujourd’hui. C’est pour cette raison que les organisations de jeunesse n’ont pas baissé les bras. Au contraire même, elles ont retroussé leurs manches et ont construit ensemble 25 propositions pour les jeunes en partant du travail déjà engagé à cette époque.

“Qu’elles soient sur le devant de la scène ou non, les aspirations des jeunes sont très claires. Nous voulons être reconnus, protégés et rémunérés à notre juste valeur, nous voulons vivre et travailler dignement, construire sereinement notre avenir.”

Camille Lainé, Secrétaire Générale du Mouvement des Jeunes Communistes de France

Ces revendications ne sortent pas du chapeau, elle correspondent aux aspirations qui se sont exprimées fortement pendant le mouvement contre la loi travail, et qui s’expriment encore aujourd’hui sous d’autres formes.  Alors que nous entrons dans la séquence des élections présidentielle et législatives, les candidats seraient bien avisés de prendre en compte ce que veulent les jeunes.

Par Rédaction

Collectif de rédaction d'Avant Garde